Ce que dit l'éditeur
Avec ses cent jeux répartis sur cinq claviers, il fut en son temps le plus important instrument construit par le grand facteur d’orgue Cavaillé-Coll (il est aujourd’hui le 4e plus grand orgue de France). Et avec son extraordinaire console en amphithéâtre en chêne et ses claviers d’ivoire, ses “machines” toujours opérationnelles depuis 1862 et ses milliers de tuyaux dont aucun n’a été changé ou modifié (une bonne part vient même de l’orgue de Clicquot du XVIIIe s.), il est un des rares instruments de Cavaillé-Coll qui nous soient parvenus intacts.
Un tel instrument a, forcément, attiré les plus grands musiciens. Et la tribune de Saint-Sulpice peut s’enorgueillir d’avoir compté des organistes titulaires qui ont été de grands compositeurs.
L’organiste de Saint-Sulpice rend hommage à ce magnifique instrument et à ses illustres prédécesseurs
Karol Mossakowski vient d’arriver à Saint-Sulpice : en 2023, il a été nommé organiste titulaire, conjointement avec Sophie-Véronique Cauchefer-Choplin, pour succéder à Daniel Roth. Pour ce CD, il a choisi des œuvres des quatre organistes du Cavaillé-Coll de Saint-Sulpice et qui l’ont précédé à cette prestigieuse tribune : Charles-Marie Widor, Marcel Dupré, Jean-Jacques Grunenwald et Daniel Roth.
Pour sa première gravure à Saint-Sulpice, ce jeune organiste aurait pu choisir des œuvres “grand public” ou brillantes ou qui auraient montré sa virtuosité éclatante. Pas du tout : Il a choisi des pièces exigeantes, intérieures, qui font de ce premier opus un ensemble d’une grande maturité, loin de tout esprit démonstratif et superficiel. La même exigence s’observe dans ses registrations : alors qu’à Saint-Sulpice il est facile de “tirer les jeux”, les choix de l’interprète se remarquent par leur économie, leur clarté, leur légèreté intérieure, austère ou aérienne. En passant, on est impressionné que ce jeune titulaire ait maîtrisé aussi bien et aussi vite son instrument pour connaître et même sentir à ce point chacun des cent registres de son orgue. Le jeu s’en ressent : clair, franc, articulée et lyrique. Alors que ce grand instrument peut être une grosse machine lourde et qui “fait du bruit”, le phrasé de Karol Mossakowski se distingue par son flux musical naturel, ses interprétations très souples, spontanées et précises à la fois, ses nuances affirmées et dynamiques : quand on sait le toucher redoutable de cet instrument, garder toujours un toucher libre, subtil et fluide est un signe, encore, de maturité musicale. Et surtout, cela permet de profiter de l’infinie palette musicale de ce chef-d’œuvre de la facture de Cavaillé-Coll.
Marcel Dupré, Trois Préludes et Fugues op. 7
Charles-Marie Widor, Trois Nouvelles Pièves op. 87
Jean-Jacques Grunenwald, Dyptique liturgique
Daniel Roth, Fantaisie fuguée sur “Regina cæli”