Ethnologie française

Comment les sociétés humaines en général, et notre société urbaine en particulier, créent-elles « leur » nature, après celle des générations précédentes ? Comment les « jardiniers » d'aujourd'hui - concepteurs d'espaces plantés - et les planificateurs ont-ils pensé la nature et la ville, dans les quartiers anciens comme dans les extensions nouvelles ?

Qu'il s'agisse de plantes, des différentes espèces animales, de l'eau, du vent, de la succession du jour et de la nuit, ces « natures » se soumettent à un environnement densément bâti, minéral, bruyant, pollué, éclairé la nuit. Des plantes, des animaux disparaissent, mais d'autres apparaissent ou reviennent. La chouette hulotte, le martin-pêcheur nichent dans les parcs publics. Des jardins accueillent des ruches installées au milieu des constructions. Les abeilles, qui butinent des fleurs venues du monde entier sur les bords des fenêtres et les balcons des citadins cosmopolites, peuvent même produire un miel savoureux et exotique : urbain.

C'est en ville que se développent de nouvelles connaissances sur les jardins, alpins ou tropicaux, zoos, musées de minéraux, collections, herbiers. Les entomologistes, les herboristes y découvrent toujours de nouvelles espèces acclimatées. Au sein de nombreuses associations, les citadins eux-mêmes contribuent à ce conservatoire.

Les articles rassemblés dans cette livraison, qui font dialoguer chercheurs en sciences sociales et en sciences de la nature, traitent de la domestication relative de différentes formes de la nature en milieu urbain : parc haussmannien, jardin « sauvage », friche devenue jardin de quartier, haies pavillonnaires ; fleurs, oiseaux, papillons et abeilles ; climats ; paysages urbains - un sauvage construit - qui ménagent des espaces plantés et composent avec les plantes adventices, l'eau des rivières, les arbres, le ciel, l'ombre et la lumière selon l'histoire et le génie local. Ils montrent que l'entretien des parcs et des jardins est une obligation permanente où des oiseaux, des insectes et de nombreux mammifères s'accommodent de notre présence, voire la recherchent. C'est à ce prix que nous pouvons parler de l'urbanité de nos sociétés.

Philippe Bonnin